Le prochain Cabinet du Québec : Un exercice délicat pour le premier ministre François Legault
Le 20 octobre prochain, le premier ministre François Legault annoncera son Conseil des ministres. Suite à l’élection de 90 députés, la tâche s’annonce ardue pour son équipe et lui. Il devra notamment tenir compte de la parité hommes/femmes, de la représentativité régionale, de l’ancienneté de certains députés et de l’arrivée de nouveaux élus. Le précédent Conseil des ministres était composé de 26 députés. Seulement trois ministres ne se sont pas représentés aux dernières élections. Il devrait cette fois-ci se situer autour de 27 à 30 ministres. Voici ceux qui peuvent aspirer à siéger à la table de décisions et ceux qui pourraient perdre leur poste.

Écrit par
Félix Lachance
Les Incontournables
Parmi les 26 ministres sortants, certains d’entre eux sont pratiquement assurés de revenir dû à leur excellente performance lors de la dernière législature. Ils ont maîtrisé leurs dossiers avec brio et bien performé devant les caméras.
Geneviève Guilbault, Députée de Louis-Hébert, Capitale-Nationale
Vice-première ministre du Québec, Ministre de la Sécurité Publique, Ministre responsable de la Capitale-Nationale
L’élection en 2017 de Mme Guilbault lors d’une partielle dans un château-fort libéral était prémonitoire de la vague caquiste qui allait déferler sur le Québec pour les années à venir. Mme Guilbault a été très présente lors de la dernière législature ainsi que durant les élections. Mme Guilbault sera assurément de retour au prochain Conseil des ministres. Elle a toutefois indiqué son souhait de ne plus être ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, en raison de sa relation tendue avec le maire de Québec M. Bruno Marchand.
Simon Jolin-Barrette, Député de Borduas, Montérégie
Ministre de la Justice, leader parlementaire, ministre responsable de la Laïcité et de la Réforme parlementaire, ministre de la Langue française, ministre responsable de la Montérégie
M. Jolin-Barrette est avocat de formation et est élu dans la circonscription de Borduas depuis 2014. Il a occupé de nombreux ministères lors de la dernière législature et était très présent lors des joutes parlementaires ainsi que dans l’actualité. Il a piloté deux des lois les plus marquantes des quatre dernières années, soit la Loi 21 (laïcité) ainsi que la Loi 96 (langue française). Il sera de retour au Conseil des ministres. Avec Mme Guilbault, il représente à la fois l’expérience et l’avenir du parti.
Sonia Lebel, Députée de Champlain, Mauricie
Ministre responsable de l'administration gouvernementale et président du Conseil du Trésor, ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie, ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Réforme électorale.
Mme Lebel s’est faite connaître en tant que procureure de la Couronne lors de la Commission Charbonneau portant sur la corruption et la collusion dans l’industrie de la construction au Québec il y a environ 10 ans. Lors des quatre dernières années elle a piloté des négociations réussies avec les différents syndicats de la fonction publique québécoise. Sa verve ainsi que son aisance avec les médias lui serviront assurément au Conseil des ministres lors des quatre prochaines années. Il y a de fortes chances que Mme Lebel devienne ministre de l’Éducation afin de mettre à profit ses compétences en négociation auprès des différents syndicats du milieu de l’éducation.
Eric Girard, Député de Groulx, Laurentides
Ministre des finances
M. Girard était auparavant trésorier de la Banque Nationale avant d’être élu en 2018 sous la bannière de la CAQ. Plutôt réservé devant la caméra, cela ne l’a pas empêché de produire d’excellents budgets et de poursuivre le rattrapage de l’écart de richesse entre le Québec et l’Ontario. Il devrait fort probablement revenir en poste au même ministère.
Christian Dubé, Député de La Prairie, Montérégie
Ministre de la Santé et des Services sociaux
M. Dubé occupait auparavant des postes en finance au sein des plus grandes organisations du pays. Il a été élu en 2012 et de nouveau en 2018. D’abord président du Conseil du Trésor puis ministre de la Santé et des Services sociaux, il a mené avec brio le gouvernement à travers la pandémie. Il fait peu de doute qu’il sera de retour à ce même ministère afin de poursuivre la réforme du système de santé, le plus important poste budgétaire du Québec.
Pierre Fitzgibbon, Député de Terrebonne, Lanaudière
Ministre de l'économie et de l'innovation, ministre chargé du développement économique régional
M. Fitzgibbon a travaillé pour certaines des plus grandes entreprises du Québec en tant que cadre supérieur avant d'être élu en 2018. Sa grande expérience dans le secteur des affaires a fait de lui un ministre populaire dans la communauté. Malgré ses manquements à l'éthique, il devrait sûrement revenir au poste de ministre de l'Économie et de l'Innovation. Il a signalé son intention d'occuper un superministère auquel s'ajouterait de l'énergie pour promouvoir Hydro-Québec auprès des investisseurs, sans créer de remous avec sa PDG Sophie Brochu.
Andrée Laforest, Députée de Chicoutimi, Saguenay-Lac-Saint-Jean
Ministre des Affaires municipales et de l'Habitation, ministre responsable de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean
Mme Laforest était entrepreneure et enseignante avant de se lancer en politique en 2018. Durant son mandat, elle a notamment conclu des ententes avec le gouvernement fédéral pour le financement de logements sociaux et abordables au Québec. Mme Laforest a remporté le plus haut pourcentage d’appuis parmi les députés de la CAQ aux élections de 2022. Quoique sa place en tant que ministre des Affaire municipales et de l’Habitation ne semble pas acquise, sa place au Conseil des ministres ne fait nul doute.
Nouveaux Venus
Bernard Drainville, Député de Lévis, Chaudières-Appalaches
M. Drainville est un journaliste de renom ainsi qu’un politicien expérimenté, l’une des nouvelles candidatures vedette de la CAQ en 2022. Il a été député et ministre du Parti Québécois de 2007 à 2016. Il a notamment réformé la Loi électorale et tenté d’adopter la Charte des valeurs. Il occupe par la suite l’animation d’une émission de radio parmi les plus écoutée du Québec. M. Drainville fera partie du Conseil des ministres et il pourrait obtenir le poste de ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale ainsi que des transports, lui qui saurait gérer l’épineux dossier du 3e lien de Québec avec brio.
Martine Biron, Députée de Chutes-de-la-Chaudière, Chaudières-Appalaches
Mme Biron est également l’une des nouvelles candidatures vedette élue aux dernières élections. Elle a mené une longue carrière journalistique et était dernièrement analyste politique à l’Assemblée nationale pour Radio-Canada. Malgré qu’il s’agisse de sa première expérience en politique active, son esprit d’analyse ainsi que son acuité politique seront certainement mis à profit au Conseil des ministres.
Kateri Champagne Jourdain, Députée de Duplessis, Côte-Nord
Mme Jourdain a délogé le Parti Québécois qui régnait dans Duplessis depuis 40 ans. Elle est la première femme autochtone élue à l’Assemblée nationale. En 2019, elle devenait la première femme autochtone à siéger au conseil d’administration du Mouvement Desjardins. Femme d’affaires, elle a travaillé au sein de son conseil de bande et a par la suite été directrice générale du premier centre d’achats au Canada développé et géré par une communauté autochtone, Les Galeries Montagnaises. Sa nomination au Conseil des ministres semble incontournable.
Céline Haytayan, Députée de Laval-des-Rapides, Laval
Mme Haytayan est l’une des nouvelles élues de Laval ayant délogé les libéraux de leur circonscription. Elle est une stratège et gestionnaire corporative ayant notamment occupé le poste de responsable des affaires corporatives internationales chez Ubisoft. Elle pourrait faire partie du Conseil des ministres, qui devra avoir au moins un élu de Laval parmi ses rangs.
Sonia Bélanger, Députée de Prévost, Laurentides
Mme Bélanger est infirmière de formation. Elle est gestionnaire du milieu de la santé et occupait depuis 2015 le poste de présidente-directrice générale du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. Étant donné sa remarquable compréhension du système de santé québécois, elle pourrait se retrouver au Conseil des ministres afin d’appuyer M. Dubé dans la réforme du système de santé québécois.
Pascale Déry, Députée de Repentigny, Lanaudière
Mme Déry a passé 15 ans au service de l’information des réseaux TVA et LCN. Elle a ensuite travaillé à l’Institut Économique de Montréal en tant que vice-présidente aux communication, développement et affaires externes puis comme directrice des relations avec les médias chez Air Canada. Son expérience dans les médias ainsi que dans le domaine privé pourrait fortement lui mériter une place au Conseil des ministres.
Daniel Bernard, Député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, Abitibi-Témiscamingue
M. Bernard détient une maitrise en génie géologique ainsi qu’un MBA. Il a été élu sous la bannière libérale en 2003 et en 2008 dans la même circonscription de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Alors que les pronostics ne jouaient pas en sa faveur en raison de la polémique entourant le Fonderie Horne, il a remporté la circonscription haut la main. Non seulement en raison de sa performance électorale mais également de son expérience politique et de la représentativité régionale, M. Bernard devrait assurément faire partie du Conseil des ministres.
Sur la sellette
Jean-François Roberge, Député de Chambly, Montérégie
Ministre de l’Éducation
M. Roberge est enseignant et est élu pour la Coalition Avenir Québec depuis 2014. Il était particulièrement efficace lorsqu’il était à l’opposition. Mais le ministère de l’Éducation est une machine difficile à maitriser et plusieurs ministres s’y sont succédés lors des dernières années. Il a complété l’entièreté du mandat à ce poste, ce qui est digne de mention en l’occurrence. Toutefois, en raison de nombreux ministres dans sa région et de la priorité que porte le parti envers l’éducation, il pourrait perdre son poste de ministre.
Nathalie Roy, Députée de Montarville, Montérégie
Ministre de la Culture et des Communication
Mme Roy est avocate de formation et a travaillé dans le monde des médias notamment en tant que journaliste, productrice et chef d’antenne. Elle est élue pour la Coalition Avenir Québec depuis 2012. Le milieu semble être globalement satisfait de son travail et souhaiterait qu’elle reste en poste afin d’assurer une stabilité dans l’avancement des dossiers. Néanmoins, ses débuts furent plutôt laborieux avant qu’elle ne reprenne du poil de la bête lors de la pandémie. Elle-même journaliste, elle avait la réputation de les éviter et a été désignée comme un maillon faible au sein du gouvernement. Les nombreux ministres dans sa région ne rendront pas la tâche facile au premier ministre, d’autant plus que certains ministres ont témoigné de leur intérêt pour son poste.
Benoit Charrette, Député de Deux-Montagnes, Laurentides
Ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Ministre responsable de la Lutte contre le racisme, Ministre responsable de la région de Laval
M. Charrette est diplômé en histoire/science politique ainsi qu’en administration publique. D’abord élu sous le Parti Québécois en 2008, il est élu depuis 2014 sous la Coalition Avenir Québec et devient ministre de l’Environnement au début du dernier mandat. Il maitrise ses dossiers sur le bout de doigts et répond bien aux questions des journalistes et des parlementaires lors de celui-ci. L’environnement a été perçu à tort ou à raison comme l’enjeu où le gouvernement est le moins solide. C’est en raison de cette perception que M. Charrette pourrait perdre son poste de ministre de l’Environnement.
François Bonnardel, Député de Granby, Estrie
Ministre des Transports, Ministre responsable de la région de l’Estrie
M. Bonnardel est élu depuis 2007 d’abord sous l’Action Démocratique du Québec puis dès 2012 sous la Coalition Avenir Québec. Il était auparavant entrepreneur dans le domaine de l’automobile. Réélu avec une forte majorité de 16 000 voix, sa place au Conseil des ministres ne fait nul doute. Il pourrait toutefois changer de ministère en raison des considérations entourant le 3e lien à Québec.
Éric Caire, Député de La Peltrie, Capitale-Nationale
Ministre de la Cybersécurité et du Numérique, Ministre responsable de l’Accès à l’information et de la Protection des renseignements personnels, Leader parlementaire adjoint
M. Caire est élu depuis 2007 d’abord sous l’Action Démocratique du Québec puis dès 2012 sous la Coalition Avenir Québec. Surnommé le « sheriff », son aplomb lors des joutes parlementaires en fait un incontournable en la matière. Toutefois, est-ce que la Capitale-Nationale peut se permettre de garder trois ministres avec l’arrivée de nouveaux élus dans de nombreuses régions? Il occupe actuellement un ministère fait sur-mesure pour lui, étant donné sa formation en informatique. Dans l’optique où il devrait laisser sa place, il pourrait devenir leader parlementaire et faire valoir sa fougue avec aplomb lors des travaux parlementaires.
Mentions honorables
Joëlle Boutin, Députée de Jean-Talon, Capitale-Nationale
Mme Boutin s’est fait élire lors d’une partielle en 2019 à Québec. Elle était auparavant directrice de cabinet à la Transformation numérique gouvernementale pour M. Caire. Elle pourrait fort bien reprendre le ministère lors de la prochaine législature.
Alice Abou-Khalil, Députée de Fabre, Laval
Mme Abou-Khalil est polyglotte et était auparavant présidente de la CAQ. Elle est consultante en technologies de l’information et en cybersécurité. Elle pourrait également aspirer à reprendre le ministère du numérique, d’autant plus qu’elle jouit d’un avantage de représentativité géographique en étant élue à Laval.
Youri Chassin, Député de Saint-Jérôme, Laurentides
M. Chassin s’est fait élire en 2018. Économiste de formation, il a œuvré au sein de groupes de recherche tel que le CIRANO, l’Institut économique de Montréal et le Conseil du Patronat. Il pourrait reprendre le ministère délégué du Développement économique régional, fort de ses contacts avec le patronat.
Sources :
- https://www.lapresse.ca/elections-quebecoises/2022-10-05/formation-du-conseil-des-ministres/apres-le-triomphe-le-casse-tete.php
- https://www.lapresse.ca/actualites/politique/2022-10-12/legault-devoilera-son-conseil-des-ministres-le-20-octobre.php
- https://www.quebec.ca/premier-ministre/equipe/conseil-des-ministres

À propos de
Félix Lachance
Félix Lachance est un jeune professionnel qui obtiendra un baccalauréat en droit et un certificat en science politique à l'Université Laval en 2022. Félix a travaillé pour la campagne victorieuse de la Coalition Avenir Québec en 2018. Vous pouvez en apprendre davantage sur Félix en consultant son profil.